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Un
conte sur la rumeur et la superstition…
Un jour, un bruit court : avoir chez soi une plume d’autruche porterait bonheur.
C’est le début de mésaventures pour ces pauvres volatiles qui se seraient bien
passés du succès inattendu de leurs plumes…
Plumes d'autruches
dessin conte pour enfants
Cette année-là, il courut dans la savane une étrange rumeur qui disait, que
celui qui aurait dans sa maison une plume d’autruche, vivrait heureux pour le
restant de ses jours.
On ne sait d’où une telle idée était sortie, mais le fait est que très
rapidement, les autruches furent pourchassées pour leur plumage. Il y avait ceux
qui, croyant naïvement à tout ce qu’on racontait, partirent à la cueillette des
précieuses plumes. D’autres, plus hypocrites, qui disaient :
-« Des sornettes que ces superstitions ! Il faut être vraiment imbécile pour
croire qu’une simple plume puisse porter bonheur ! »
-« Oui, comme si cela pouvait changer le cours des choses… Comme le monde est
bête ! »
-« Les gris-gris, c’est d’une autre époque, ou pour les peuples primitifs. Nous
qui sommes évolués, nous ne pouvons cautionner de telles stupidités ! »
Mais ces personnages si sûrs de leur fait quand ils parlaient entre eux, se
débrouillaient quand même pour cacher une insignifiante plume d’autruche,
quelque part dans leur maison, au cas où… Après tout, on ne savait jamais. Et
puis, ça ne pouvait pas faire de mal, alors…
Seuls, quelques rares spécimens, qui vivaient pour eux, et ne s’intéressaient
pas aux rumeurs circulantes, ne modifièrent pas leurs habitudes et ne se
préoccupèrent pas des plumes d’autruches.
Mais le mal sévissait grandement chez les malheureux volatiles. Ceux-ci,
convoités pour leur plumage, se trouvaient assiégés de tout côté, et géraient la
situation comme ils pouvaient.
Certaines autruches étaient plutôt consentantes, soit qu’elles étaient heureuses
de faire plaisir, ou bien qu’elles appréciaient qu’on s’intéresse à elles, ou
encore qu’elles soient fières qu’on les choisisse…
Mais, la plupart n’avait pas envie de céder ainsi leur plumage. C’était qu’il
leur tenait chaud, et qu’il les habillait aussi ! Imaginez une autruche
déplumée : ridicule ! En plus, qu’on leur chipa comme ça des plumes, parfois
sans leur demander et sans ménagements, ça faisait mal !
-« Aïe, ouille, oooh » entendait-on crier dans différents coins de la savane.
Les pauvres oiseaux se faisaient arracher leurs plumes, et c’était plutôt
douloureux ! Bientôt, on ne trouva plus dans la savane une seule autruche
emplumée. Seuls, de grands échassiers à la peau rose, étaient visibles.
Cela déclencha parmi les êtres pensants de grands débats. Certains crurent à
l’extinction d’une race et à la naissance de nouveaux animaux que l’on baptisa
les austrorosums.
D’autres envisagèrent une évolution animale, démarrée du temps des dinosaures,
avec les australopithèques, ceux-ci mutant progressivement en autruches
emplumées, en passe de devenir dans quelques millions d’années, des êtres sur
deux pattes, debout, avec une petite tête…
D’autres enfin, dénoncèrent la pollution qui, avec les pluies acides, avait dû
attaquer le plumage de ces pauvres oiseaux…etc…etc.
Il y eut des combats d’experts, chacun y alla de sa théorie la plus farfelue.
-« Vous êtes un ignare, professeur Rosenmarket. Annoncer que les autruches ont
subi une irradiation nucléaire, c’est complètement stupide ! Vous devenez
gâteux, il est temps de prendre votre retraite… »
-« Et vous, docteur Charlatus, vous êtes fou : des extra-terrestres, ces pauvres
volatiles… Mais vous n’y pensez pas, et pourquoi pas des robots migrateurs, tant
que vous y êtes ! »
-« Taisez-vous avec vos sornettes, seule la science est exacte. Je suis le
savant Notrouvaille, et mes calculs m’indiquent que nous avons affaire à un
animalus bipedus, doté d’un becus placé au niveau de la tête, dont la fonction
me sera clairement expliquée quand j’aurai résolu ces équations à cinquante
inconnus, et que j’aurais déterminé le quotient de la racine carrée du
pourcentage alpha de la mémoire x associée à la polarité gamma… »
La savane n’en finissait pas de ces théories fumeuses, plus extravagantes les
unes que les autres.
Et les animaux avec leurs plumes d’autruches, étaient-ils heureux ? Certains le
crurent, car ils mettaient sur le compte de ce porte-bonheur, les petits
bienfaits de la vie quotidienne, qu’ils ne remarquaient pas auparavant.
D’autres qui attendaient un bouleversement complet et heureux de leur existence
furent un peu déçus, mais conservèrent la plume, car ils espéraient qu’elle
allait produire prochainement son effet.
D’autres enfin, prirent conscience de leur naïveté et s’évertuèrent à construire
eux-mêmes leur bonheur, plutôt que de l’attendre passivement en se reposant sur
une pauvre plume, dont les effets ne seraient vraisemblablement pas miraculeux…
Avec le temps, le plumage des autruches repoussa et, comme quasiment toutes les
maisons étaient dotées d’une plume, on ne les embêta plus.
Quant à nos savants, qui avaient retrouvé de vraies autruches, ils purent
échafauder de nouvelles théories sur ce qui s’était passé.
-« Les Martiens sont repartis sur leur planète et ont rendu les autruches qu’ils
avaient kidnappé… »
-« N’importe quoi ! C’est la lutte contre la pollution qui a porté ses fruits et
produit des effets bénéfiques… Vive la nature ! »
-« 3y2xXxracine carrée(324128-béta-140m3x1km2) cos oméga 3, c’est cela,
j’approche, il me reste encore : 9200432 divisé par 153425x2z(a+b)-0,009… »
Et bien sûr, n’y rien comprendre ! Et pourtant, en regardant et en écoutant
bien, c’était tellement simple de saisir la vérité !
Créé le 13 mai 2005 par Valérie Bonenfant
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