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Quand une merveille de la vie
devient un objet de convoitise…
Un chat, au regard fabuleux qui éclaire la nuit, est capturé par un bohémien peu
scrupuleux…
Sa délivrance ? Il ne la devra qu’à l’intervention d’amis inattendus : les
mulots qu’il s’évertuait en d’autre temps à chasser…
Le chat aux yeux de lumière
dessin conte pour enfants
Maxou était un chat spécial : il était né avec des yeux lumière qui
éclairaient tout ce qu’il regardait.
Le jour, cela ne se remarquait pas trop, car ses faisceaux allumés ne se
distinguaient pas.
Mais la nuit, ses yeux étaient comme deux phares qui balayaient l’obscurité, et
qui le faisaient repérer immanquablement.
Pas facile de chasser avec de tels signaux indicateurs pour les proies !
Celles-ci, apercevant les lumières, s’enfuyaient aussitôt.
Maxou dut alors développer une technique de chasse nocturne particulière : la
traque les yeux fermés. Il se tapissait dans un endroit bien dissimulé, et
ensuite, abaissait ses paupières. Il patientait de longs moments, à l’affût des
moindres bruits.
Parfois, il entendait un feuillage bruiter un peu plus loin.
-« Tiens, ce doit être une souris qui passe sous le buisson de buis » se
disait-il.
Car Maxou, avec le temps avait mémorisé précisément tous les lieux de son parc
de chasse, et pouvait sans faute, à l’oreille, indiquer quel animal passait à
quel endroit.
Un jour, un pas inconnu, lourd et précipité, s’approcha.
-« Qu’est-ce que cela pouvait être ? « s’interrogea Maxou.
Mais le chat eut beau passer en revue tout son répertoire, il ne connaissait pas
cette marche-là. Que faire ? Ouvrir les yeux ? Mais alors il se ferait repérer
aussitôt, et risquerait de se faire attraper par l’animal, potentiellement
dangereux.
Maxou décida alors, les yeux fermés, de se mettre en lieu sûr. N’entendant plus
de bruit, il se leva et, silencieusement, se dirigea vers sa maison.
Mais soudain, patatras, il sentit quelque chose lui tomber dessus et le
maintenir fermement.
Maxou se débattit de toutes ses forces, griffa, miaula rageusement, mais rien
n’y fit : il était pris.
Alors, n’y tenant plus, voulant découvrir qui était son agresseur, il ouvrit les
yeux. Un homme, avec un bandeau sur la tête, et une grosse boucle d’oreille.
Joyeux apparemment, vu le large sourire qui traversait de part en part son
visage.
-« N’aie pas peur, mon beau minou ! Je ne vais pas te faire de mal. Je veux
simplement t’emmener avec moi, et montrer au monde ton regard merveilleux. »
Maxou résista encore : il hérissa son poil, siffla entre ses babines
retroussées.
-« C’est de l’or, ton regard lumineux ! Tu vas voir, avec moi, tu n’auras plus
besoin de chasser la nuit ! Je te donnerai tout ce que tu voudras ! Tu n’auras
qu’à ouvrir les yeux, le soir, aux gens qui paieront pour venir te voir… Hé hé
hé ! » dit le bohémien en se frottant les mains.
Maxou comprit alors le marché. Faire l’attraction des foules pour gagner sa
pâtée… Non merci !
Alors malin, il fit semblant de coopérer, rentra ses griffes, et miaula plus
gentiment.
-« Bien, mon minou, te voilà devenu raisonnable… Et en plus, tu es mignon comme
tout. Je vais quand même te mettre une laisse pour que tu ne t’échappes pas… »
Zut, il n’avait pas pensé à ça ! Ca allait être plus difficile de s’échapper
maintenant. Le collier bien serré autour du cou, accroché à une corde, Maxou
réfléchit : pas de solution pour l’instant.
Le temps passait, la nuit n’allait pas tarder à tomber, et son nouveau
propriétaire viendrait bientôt le solliciter… Il fallait faire vite !
Mini le mulot s’approcha de lui.
-« Bonjour Maxou, on dirait que tu as des problèmes… »
Le chat reconnut l’une de ses proies, qu’il avait tenté d’attraper plusieurs
fois, sans succès.
-« Oui hélas… On m’a pris à cause de mes fichus yeux ! On veut les montrer en
spectacle, le soir… » dit le chat tristement, qui à ce moment-là, aurait voulu
avoir des pupilles normales, comme ses autres congénères.
-« Je comprends… Et bien sûr, tu n’es pas d’accord… Bon, ne t’inquiète pas, on
va te tirer de là… » dit Mini.
Étonné mais plein d’espoir, le chat vit disparaître Mini. Quelques instants plus
tard, celui-ci revenait avec une colonie de mulots. La corde ne résista pas
longtemps : toutes les petites bêtes la rongeaient hardiment.
Bientôt, Maxou se trouva libre à nouveau. Comme il faisait encore jour, il put
s’enfuir les yeux ouverts, suivi de sa cohorte de rongeurs.
Après plusieurs kilomètres parcourus qui le mettaient à distance respectable du
bohémien, il souffla :
-« Merci les amis. Sans vous, je serais maintenant un chat de foire, privé de
liberté ! »
et il ajouta :
-« Je promets solennellement de ne plus jamais vous chasser. »
Des petits gloussements se firent entendre parmi les mulots. Mini dit alors :
-« Ne le prends pas mal, mais franchement, nous ne craignons pas ta chasse. Car
tes yeux, même fermés la nuit nous protègent… C’est une bénédiction pour nous
d’avoir un chat comme toi, plutôt que ces matous belliqueux qui ne font pas de
quartier ! Nous voulons te garder. Quant à tes yeux de lumière, ils méritent
mieux que d’être montrés en spectacle lucratif. Ce sont des joyaux divins que
nous devons protéger des convoitises humaines. Car aucun animal, à part les
hommes, ne se permettrait jamais d’attenter à de telles merveilles… »
Maxou vécut alors de longues et belles années, en harmonie avec le monde, et à
l’abri de tout contact avec les hommes.
Quant au bohémien, il chercha désespérément toute sa vie, le chat qui aurait pu
le rendre riche, et vécut misérablement.
Créé le 15 août 2005 par Valérie Bonenfant
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