| |
L’histoire d’une petite étendue d’eau au caractère bien trempé !
Joliette est une mer de taille réduite. Invisible sur une carte, elle n’est
reconnue qu’à travers les deux grands Etats qui la bordent. Mais elle, ce
qu’elle désire, c’est exister pour elle-même… Alors, elle va s’évertuer à faire
parler d’elle, et bientôt tout le monde va la connaître… Comme vous, assurément
!
La mer Joliette
dessin conte pour enfants
La mer Joliette était une petite mer coincée entre deux Etats, si petite qu’elle
ne figurait sur aucune carte… Cela lui était d’une grande contrariété.
-« Alors voilà, sous prétexte que sur un atlas, je ne serais pas plus grande
qu’une tête d’épingle, je ne figure pas…Et pourtant, j’existe, moi ! Certes, il
n’y a pas la quantité, mais la qualité, elle, est présente ! »
Elle râlait et désespérait de ne pas être reconnue pour ce qu’elle était : une
mer aux dimensions certes réduites, mais une mer quand même. A ses côtés, les
deux Etats qui la bordaient, tentaient de la calmer un peu.
-« Ce n’est pas si important. Tu n’apparais pas mais tu reçois quand même les
visites des touristes qui viennent nous voir… » dit l’Etat de l’Est.
-« Oui, nous, nous sommes dans tous les guides… » renchérit l’Etat de l’Ouest.
-« Certes » concéda Joliette, « mais les gens ne viennent pas pour moi. Ils
tombent sur moi par hasard… »
-« Hé bien, ça leur fait une bonne surprise ! » avança le pays de l’Est.
-« Bien sûr ! Rends-toi compte, ils viennent visiter un patrimoine et découvre
en sus, un lieu de baignade… Quelle aubaine pour eux ! »
Mais, la mer Joliette ne parvenait pas à se résoudre d’être l’« à côté » de l’Etat
de l’Est ou de l’Ouest. Elle, ce qu’elle souhaitait, c’était d’être reconnue
pour ce qu’elle était, et d’être choisie pour elle-même.
Un jour, elle décida de prendre son destin en main. Ah, on ne la connaissait pas
? Qu’à cela ne tienne, elle allait faire parler d’elle, et bientôt, toute la
planète serait au courant de son existence. Au travail ! Elle s’y mettait tout
de suite !
Elle commença par créer des marées exceptionnelles. Pour cela, elle agita ses
fonds, un coup à gauche, un coup à droite. Puis, elle recommença, de plus en
plus fort, et de plus en plus vite.
Bientôt, les bateaux qui venaient naviguer dans les eaux habituellement calmes
du secteur, ne comprirent pas ce qu’il leur arrivait. Ils balançaient, un coup à
gauche, un coup à droite, comme si la mer penchait soudainement. Pourtant, il
n’y avait pas de vent ! Quel mystère ! Mais l’heure n’était pas à la résolution
de ce problème compliqué ! Ce qui comptait, c’était de se mettre à l’abri de ce
tumulte désordonné ! Tout le monde rentra au port.
La tempête ne se calma pas pour autant. Joliette continua à enfler ses eaux, qui
bientôt, débordèrent chez les Etats voisins.
-« Hey, tu m’as mouillé ! » râla l’un.
-« Et moi, tu as tout arrosé mes plates-bandes ! » ronchonna l’autre.
Qu’importaient ces jérémiades, Joliette était déterminée. Pas question de
s’arrêter là ! Elle monta encore le niveau de ses eaux, et produisit de
gigantesques vagues.
Et un tsunami à l’Est ! Et un autre raz-de-marée à l’Ouest ! Pas mal, celui-là
était arrivé jusqu’au bord de la ville de Winston. Et de l’autre côté :
satisfaisant aussi, la vague était venue chatouiller les pieds des grandes tours
de Malatakoff !
Des deux côtés de la mer, la presse s’était emparée de l’affaire.
-« La mer en folie ! » titrait le journal du pays de l’Est.
-« La nature déraisonnée ! » clamait le quotidien de l’Ouest.
Joliette était contente : enfin, on parlait d’elle ! Elle maintint son activité,
histoire de ne pas faire retomber l’intérêt.
-« Joliette, ça suffit, tu fais peur à nos vacanciers ! » gronda l’Etat de
l’Est.
-« Tu gâches tout ! Comment veux-tu qu’ils se baignent avec de telles vagues !
Pour eux, tu es devenue un cauchemar ! » reprocha l’Ouest.
Mais peu importaient les quelques déçus ! Ceux qui viendraient seraient vraiment
là pour elle, pour découvrir ce phénomène étonnant qu’elle mettait en œuvre…
Et effectivement, du monde arrivait. Des journalistes pour faire leur reportage,
en direct des lieux. Mais aussi des curieux, souhaitant se rendre compte par
eux-mêmes… Et encore des surfeurs, toujours en quête de glisse sur de nouvelles
vagues…
Bientôt, des avions entiers débarquèrent à Winston ou Malatakoff, des passagers
par centaines. Des lignes régulières furent établies en provenance des plus
grands capitales du monde… Jamais les Etats n’avaient été aussi fréquentés ! Du
coup, ils ne trouvèrent plus rien à redire à leur voisine…
Et cela, même si désormais, les voyageurs ne venaient plus dans le but premier
de visiter leur pays, mais plutôt d’approcher cette mer si extraordinaire…
Celle-ci figura dès lors, dans tous les atlas du monde…
Créé le 24 juillet 2007 par Valérie Bonenfant
| |
|