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La disparition des espèces
Dans chaque région, les conditions écologiques ne sont pas uniformes, et il y existe une plus ou moins grande variété d'écosystèmes, qui constituent des mosaïques complexes, donnant autant de paysages différents. Chaque paysage possède ainsi une certaine diversité écologique. Chaque écosystème est lui-même plus ou moins riche en espèces de toutes sortes. A l'intérieur d'un écosystème, les spécialistes distinguent différents groupes d'espèces, soit d'après leur parenté, définie de façon plus ou moins précise (par exemple l'ensemble des oiseaux, ou parmi ceux-ci, une famille particulière) ; soit d'après leur rôle dans le milieu : on regroupera par exemple les oiseaux insectivores capturant leurs proies dans le feuillage, mais on en séparera ceux qui se nourrissent d'insectes du sol. Chaque groupe ainsi défini peut alors être caractérisé par le nombre des espèces qui le composent, et ce nombre, appelé diversité spécifique, peut être suivi au cours du temps, afin de voir s'il y a enrichissement ou appauvrissement. Il permet également des comparaisons entre écosystèmes, ce qui permet de s'interroger sur les raisons qui font que certains écosystèmes sont moins riches que d'autres. Chaque espèce est composée de populations qui se répartissent dans une aire géographique plus ou moins étendue. Au sein de chaque population, les individus ne sont pas identiques. Chacun est porteur d'un ensemble de gènes — son "matériel génétique"— qui comporte quelques caractères uniques. Il y a une diversité génétique fondamentale qui résulte de phénomènes survenant au cours des processus de reproduction. C'est cette diversité génétique qui est exploitée par l'homme lorsqu'il sélectionne différentes variétés à partir d'une espèce sauvage. Evolution et biodiversité Les êtres vivants ont une origine unique, fait que confirment notamment les recherches en biologie moléculaire. Tous les organismes sont constitués avec les mêmes types de molécules fondamentales, en particulier celles qui constituent le matériel génétique. Les mécanismes reproducteurs sont extraordinairement précis ; ils sont néanmoins imparfaits, sinon la vie sur Terre ne serait représentée que par des copies conformes du premier système doué d'autoreproduction. La diversification des êtres vivants, leur déploiement dans des environnements très différents de celui dans lequel la vie est apparue, ont donc été rendus possibles par l'imperfection du processus fondamental de la vie, la reproduction. - Mais la transformation des êtres vivants n'a eu lieu, selon les modalités que l'on connaît -incomplètement- aujourd'hui, que parce que la Terre elle-même n'a cessé d'évoluer : les milieux océaniques et marins, l'atmosphère, la configuration et la répartition des continents, le fonctionnement climatique de la planète ont changé, du fait de la dynamique physique du globe, et, peu à peu, du fait de l'expansion des organismes vivants. Ceux-ci ont joué un rôle grandissant vis-à-vis de la composition chimique des eaux et de l'atmosphère, vis-à-vis aussi des phénomènes de sédimentation et, à la surface des continents, vis-à-vis des phénomènes d'érosion. Dans ce contexte changeant, des lignées d'êtres vivants se sont diversifiées, de nouvelles espèces se sont constituées, présentant de multiples adaptations peu à peu ajustées sous l'effet permanent de la sélection naturelle qui trie dans la diversité génétique, au sein de chaque espèce. - L'évolution est aussi faite de disparitions d'espèces, à des vitesses variables selon les lignées, et sous l'effet de causes multiples toujours difficiles à élucider complètement. L'étude des fossiles révèle des phases d'extinctions "massives", s'étendant en fait sur de longues périodes, mais caractérisées par la disparition concomitante de lignées différentes, dont certaines s'éteignent totalement. Le phénomène, à l'échelle des temps géologiques, paraît rapide, mais c'est en quelque sorte une illusion d'optique. Aux disparitions font suite l'expansion et la diversification d'autres lignées, qui semblent prendre les places laissées libres. Telle est la trame de la vie, faite de phénomènes de grande ampleur comme d'événements modestes, qui tous entretiennent, à différentes échelles d'espace et de temps, la dynamique évolutive, mêlée d'extinctions naturelles et d'apparitions de nouvelles espèces, s'associant en systèmes écologiques changeant au fur et à mesure : diversité génétique, diversité spécifique et diversité écologique se modifient au rythme de l'évolution. Un héritage en danger La biodiversité que l'on répertorie aujourd'hui est l'héritage de cette histoire commencée il y a plus de trois milliards d'années. Mémoire incomplète, puisque bien des espèces ont disparu, mais mémoire unique, qui constitue en même temps le potentiel d'évolution disponible pour l'avenir. Or, en quelques 12 000 ans, et surtout depuis deux siècles, et davantage encore depuis quelques décennies, l'humanité provoque de profondes modifications de cet héritage, modifications dont la régression, voire la disparition, d'un nombre croissant d'espèces est un aspect particulièrement préoccupant. Les espèces dont la disparition est avérée se comptent par centaines. Il s'agit surtout de vertébrés -poissons, amphibiens, reptiles, oiseaux, mammifères- et de plantes supérieures, groupes qui sont assez bien inventoriés. Mais le phénomène affecte certainement bien d'autres catégories, et la destruction massive de certains écosystèmes fait vraisemblablement disparaître quantité d'espèces discrètes que les scientifiques n'avaient même pas répertoriées. Il en est ainsi de nombreuses forêts tropicales, en particulier insulaires. Sans doute la disparition d'espèces est-elle un phénomène lié à l'évolution, mais l'échelle de temps a radicalement changé. L'homme n'est pas en mesure de compenser, par la création de nouvelles formes -perspective qu'entrouvre le développement du génie génétique- toutes celles qu'il fait disparaître. D'ailleurs, il provoque même la régression, parfois la disparition, de variétés cultivées et domestiques que des générations avaient patiemment sélectionnées en fonction de besoins très variés selon les contextes culturels locaux. De façon plus générale, la croissance numérique de l'humanité, l'amplification et la diversification de ses moyens d'action sur l'environnement naturel, se conjuguent en un processus global de modification de la planète, associant régression de la diversité génétique de nombreuses espèces sauvages et domestiques, régression de la richesse spécifique globale, de la diversité spécifique de. nombreux écosystèmes et modification profonde du fonctionnement de ceux-ci. La dynamique évolutive s'en trouve nécessairement changée : l'espèce humaine est devenue un facteur majeur d'évolution. Développement durable et biodiversité Dans une perspective politique, au meilleur sens du terme, il faut s'interroger sur les stratégies à développer vis-à-vis de la biodiversité : source d'aliments, de substances naturelles d'intérêt divers, notamment pharmacologique, de matières premières, et de satisfactions esthétiques. Il y a longtemps que l'on se préoccupe, dans certains milieux, de la conservation des composantes naturelles de l'environnement. Mais aujourd'hui, la biodiversité devient un enjeu planétaire, qui s'inscrit désormais dans la perspective du développement durable, notion établie en 1987 par la Commission mondiale sur l'environnement et le développement. Selon celle-ci, "le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs". Il conviendrait donc de ne pas soustraire aux générations futures des éléments de la biodiversité actuellement sans valeur, mais qui pourraient se révéler dans l'avenir être des ressources indispensables. Or les besoins du futurs peuvent être imaginés de multiple manière, et seront peut-être différents de tout ce que l'on aura été capable d'imaginer. Il conviendrait donc, selon un principe de précaution généralisé, de conserver un maximum de potentialités : la conservation de la biodiversité serait donc l'un des aspects majeurs d'une véritable politique de développement durable. Toutefois il existe au moins deux regards sur la biodiversité: un regard utilitaire et un regard culturel. Au premier correspond la question : si la biodiversité est utile, comment faire, techniquement, pour la conserver ? Avec le second, s'ouvre une perspective bien plus vaste : la biodiversité, dans ses multiples aspects, est constitutive des cultures des sociétés diverses qui se sont structurées dans les différentes parties du monde : diversité biologique et diversité culturelle s'imbriquent. Mémoire de l'évolution de la vie, la biodiversité est mémoire pour l'homme lui-même. Bien au-delà d'une conception utilitaire, voire mercantile, de la conservation de la biodiversité, c'est donc l'éthique qui en justifie le principe, car le devenir de la biodiversité ne prend sens que dans le cadre d'une réflexion sur le devenir des hommes. dernière mise à jour : 21/03/2018 |
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